Strasbourg, le 17 juin 2008

Rapport Jackson / Déchets

L’UE croule sous les déchets, chaque citoyen européen produit en moyenne 3,5 millions de tonnes de déchets par an. Près de la moitié des déchets est mise en décharge, plus d’un quart, recyclé et près d’un cinquième, incinéré. Après deux ans de procédure de révision de la directive actuelle sur les déchets, un accord a été conclu entre le Conseil et Madame Jackson, rapporteure sur ce dossier pour le Parlement européen. Ce compromis a aboutit à des objectifs insuffisants; les points qui concernent le recyclage et la prévention des déchets à moyen et long terme restent très limités. L’incinération des déchets sera considérée comme une valorisation énergétique, et cela contre la position initiale du Parlement européen.

Le compromis n’est pas acceptable parce qu’il manque d’ambition et ne fait entrevoir aucune avancée sur les questions liées aux déchets dangereux. Au même titre, il n’apporte rien sur les problématiques de prévention et de stabilisation du volume des déchets. Au final, cette révision accouche d’une directive en retrait par rapport aux dispositions actuelles.

Les socialistes français au Parlement européen n’ont pas soutenu cet accord car ils estiment qu’il est insuffisant en matière d’objectifs et éloigné des mesures nécessaires à prendre et à appliquer pour réduire et leur volume et leur nocivité pour l’environnement et la santé humaine.

« Si l’UMP estime que cet accord entre le Conseil et le PE est raisonnable, les socialistes français estiment qu’il est surtout raisonnable de le rejeter », a déclaré Anne Ferreira, membre de la commission de l’environnement et de la santé publique au Parlement européen.

« Comme pour les pesticides, les principales orientations prônées dans le cadre du Grenelle de l’environnement sont contredites à Bruxelles », constate par ailleurs Anne Ferreira.

Des positions des socialistes européens et français défendues ou adoptées en première lecture, il ne reste quasiment rien hormis la hiérarchie des opérations de traitement des déchets. Les dispositions exigeantes qui permettent une gestion et un traitement rigoureux des déchets dangereux ont disparu, il sera notamment possible d’exempter de permis les installations de traitement des déchets dangereux. Les Etats membres ne sont plus obligés de mettre en place des plans de prévention des déchets. Oubliée aussi la stabilisation du volume des déchets fixée pour 2012. Particulièrement préoccupant, le déclassement des déchets en ressources ou matériaux est facilité. Ce texte est aussi truffé d’imprécisions quant aux définitions de recyclage et de valorisation.

La classification de l’incinération comme valorisation énergétique est insatisfaisante. En effet, même si l’incinération avec production et récupération d’énergie est préférable à la mise en décharge. «  Elle n’en reste pas moins une élimination et non une valorisation », souligne encore Anne Ferreira.

Cette directive laisse la porte ouverte à une multitude d’incertitudes concernant le classement et la valorisation énergétique. Les dispositions et les objectifs en matière de recyclage sont trop faibles. Le risque de voir des déchets se détourner du recyclage au profit de l’incinération va se développer. Au final, il n’est pas sûr que l’objectif de société européenne du recyclage puisse être atteint. L’échec de cette directive met en avant l’urgente nécessité d’adopter d’autres législations sur les produits impliquant une conception plus respectueuse de l’environnement.

La responsabilité des Etats est lourde. Ils n’ont eu de cesse de rejeter et d’affaiblir les positions du Parlement européen, qui avait renforcé les dispositions en matière de gestion et de traitement des déchets.

Cet accord sacrifie la quasi-totalité des nombreuses avancées obtenues en commission de l’environnement en seconde lecture et par le Parlement européen en première lecture pour se focaliser essentiellement sur les mesures ou des objectifs non contraignants de prévention et de recyclage. Certes, ils sont importants, mais ils ne garantissent pas à eux seuls une gestion durable et optimale des déchets à la hauteur des défis environnementaux, du changement climatique et de la santé humaine des citoyens européens.