Comme nous le présagions, la crise économique que nous traversons va conduire à une explosion des prêts bancaires dits « non performants », autrement dit les créances qui ne seront pas remboursées par leurs emprunteurs pour un total de 1 400 milliards d’euros. En cause : les politiques économiques des États européens misant essentiellement sur le recours au prêt, ainsi que le desserrement des contraintes réglementaires sur les banques.
« Dès le mois d’avril, nous avons demandé à la Commission européenne d’étudier la création d’une structure publique de défaisance (‘bad bank’) afin d’y transférer les centaines de milliards d’euros de prêts “pourris” détenus par les banques européennes et d’éviter une contagion de la crise économique actuelle vers la banque et la finance », explique la députée européenne Place publique et économiste Aurore Lalucq.
Dans sa communication du 15 décembre 2020, la Commission européenne se dit « prête à assister les États membres dans la mise en œuvre de structures de défaisance », mais rappelle que « les solutions fondées sur le marché (“market-based solutions”) restent la priorité ». En clair : continuer de s’appuyer sur les marchés et leur faire confiance pour régler cette crise jusqu’à ce que les dégâts soient trop importants et nécessitent l’intervention de la puissance publique : une logique dangereuse selon les membres de la délégation socialiste et écologiste au Parlement européen.
« Nous sommes encore bien loin du projet de ‘bad bank’ européenne, qui nous permettrait pourtant de faire face à ce mur de dette privée et aux risques que feraient courir son effondrement. Celle-ci nous permettrait non seulement de récupérer ces créances douteuses, mais également d’exiger en retour que les banques s’engagent davantage dans le financement de l’économie réelle et cessent de financer les activités polluantes. Si rien n’est fait en ce sens, l’année 2021 pourrait être l’année de tous les dangers pour le système bancaire et financier » ajoute Aurore Lalucq.
« Plus globalement, dans une situation où nombre d’entreprises doivent faire face à un ralentissement ou un arrêt de leur activité, il est temps de se tourner vers d’autres solutions que le recours systématique au prêt et au système bancaire. C’est la raison pour laquelle Jézabel Couppey Soubeyran et moi-même proposons, depuis près d’un an, le recours à la monnaie hélicoptère : une subvention apportée aux entreprises grâce à la monnaie centrale et qui n’aurait pas à être remboursée. Face à l’ampleur de la crise économique et aux risques potentiels pour le secteur bancaire et financier, il ne faut pas avoir peur de se tourner vers des solutions nouvelles et efficaces » conclut Aurore Lalucq.