Aujourd’hui, la présidente de la Commission européenne a tenu le traditionnel discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen à Strasbourg. Ursula von der Leyen l’a prononcé avec engagement et détermination soulignant un soutien sans faille à l’Ukraine, tant au niveau des symboles que des moyens.

Elle a confirmé la volonté de la Commission de proposer une taxe sur les superprofits : nous sommes d’accord car ces profits sont immoraux. Avec cette taxe, ce serait près de 140 milliards d’euros qui pourraient être redistribués aux citoyens et aux entreprises pour les aider à faire face à l’inflation.

Pour faire face à l’enjeu majeur de la hausse des prix de l’énergie, la réforme promise est tardive, mais mieux vaut tard que jamais : alors qu’un hiver difficile approche, les États membres doivent rapidement trouver un accord sur les mesures les plus urgentes.

Nous notons également avec satisfaction que la Commission européenne insiste sur le renforcement stratégique de la souveraineté européenne, qu’elle soit énergétique ou industrielle.  Sur les matières premières critiques comme le lithium et les terres rares, l’anticipation permettra de se prémunir d’une situation d’extrême dépendance vis-à-vis d’un pays comme cela a été le cas avec le gaz. Il conviendra d’allouer les ressources nécessaires à ce « Fonds de souveraineté ».

Dans les points positifs toujours, nous saluons la prise de conscience et la désignation des menaces réelles et multiples qui pèsent sur nos démocraties et l’importance cruciale à accorder à la lutte contre les ingérences étrangères et les violations de l’État de droit, au premier rang desquelles la corruption au sein même de nos États. Nous nous réjouissons de l’inclusion de la corruption au champ d’application du régime de sanctions ciblées et de l’annonce d’un pacte pour la défense de la démocratie.

Nous notons aussi le renouvellement de l’engagement à défendre la démocratie au sein de l’Union européenne tout comme l’appel à étendre à l’ensemble des réfugiés la façon dont les réfugiés ukrainiens ont été accueillis. Mais on nous permettra toutefois douter de la manière dont cet enjeu avancera.

Enfin, la Présidente de la Commission européenne propose elle aussi de convoquer une Convention européenne – que le Parlement européen a appelée de ses vœux – pour réformer le fonctionnement de l’Union européenne. Il conviendra de donner un prolongement à cette idée.

Dans les points flous, parce que nous considérons que les règles budgétaires européennes ne sont plus adaptées et souhaitons renforcer les investissements verts et sociaux, nous attendons les détails précis car nous sommes inquiets qu’il s’agisse encore une fois de réduire la dette avec des mécanismes de contrôle et de sanctions.

Dans le contexte de la guerre en Europe et d’une révision à venir du cadre financier, nous regrettons que les besoins de coordination, d’investissements et de renforcement des capacités de défense commune n’aient pas été évoqués, tant ils sont vitaux pour la sécurité et l’autonomie de notre Union.

Sur l’hydrogène, nous insistons sur le fait qu’aujourd’hui il n’est pas vert et que ça ne peut être qu’une solution de long terme, et que l’urgence est bien de miser sur la sobriété, l’efficacité énergétique et les renouvelables. Le fait qu’Ursula von der Leyen reconnaisse que les subventions aux énergies fossiles étaient une erreur constitue également un progrès notable : reste à tirer les conclusions qui s’imposent !

Enfin dans les multiples ombres au tableau de ce discours, l’absence cruelle de propositions concrètes et à long terme en matière d’Europe sociale – comme la transformation de SURE en mécanisme pérenne – de cohésion, de solidarité territoriale et de défense : alors que la pauvreté gagne du terrain en Europe, nous voulons croire que ces manques seront vite comblés, car cette occasion manquée sur ces points importants est une véritable faute politique.

À aucun moment la Présidente n’a fait moindre allusion à l’enjeu agricole et alimentaire durant le débat sur l’état de l’Union, alors que nous sommes à l’aube d’une crise alimentaire majeure et que nous subissons une inflation alimentaire galopante. Le contexte nous oblige à renforcer l’unité de tous les Européens et à veiller à la stabilité politique à l’extérieur de l’Union européenne.

Enfin, tout cela pose la question des acteurs institutionnels et des moyens, donc celle de la révision du cadre financier. Aux États membres d’être conséquents, au regard des attentes qui sont placées dans l’Union européenne ! Le Parlement – dans un rôle moteur – et la Commission ont été globalement à la hauteur des défis et des périls mais le Conseil est incontestablement le maillon faible des institutions européennes. Cela, Ursula von der Leyen ne pourra pas le changer à l’occasion d’un discours.