Même si les révolutions arabes ont un impact mineur en terme de déplacements de populations et n’entraîneront pas de déferlement de migrants en Europe, l’Union se montre incapable d’organiser une réponse solidaire à visage humain afin d’accueillir les réfugiés qui parviennent jusqu’à nos frontières. Alors qu’elle dispose déjà des outils législatifs nécessaires.

 

Pour écouter l’interview : L’Europe au quotidien et les révolutions arabes, la chronique d’Anja Vogel (1’58 »)

Tunisie, Egypte, Lybie, Syrie : des peuples se révoltent, même ceux que l’on pensait figés sous la coupe des dictatures. L’Europe sait que ce « Printemps arabe » constitue un événement planétaire, comparable à la chute du Mur de Berlin. Elle s’en félicite ; le Parlement Européen s’émeut et observe une minute de silence quand des réfugiés font naufrage et se noient en Méditerranée, au large de Lampedusa ; mais les 27 renoncent à leur devoir d’hospitalitélorsqu’il s’agit d’accueillir ceux qui réussissent à venir frapper à nos portes.

Sous la poussée des mouvements xénophobes et populistes, chacun se replie sur soi, on ferme les frontières, on suspend le trafic ferroviaire, et on se renvoie les migrants comme des pestiférés. L’Italie dénonce le manque de solidarité entre Etats membres et délivre des visas temporaires ; la France remet en cause l’Espace Schengen.

Et pourtant les outils législatifs existent, explique l’eurodéputée socialiste française Sylvie Guillaume, rapporteure du Parlement Européen pour la politique d’asile. En-dehors du statut de réfugié, l’Union Européenne s’est dotée d’une directive afin de répondre solidairement à “l’afflux massif de migrants” : elle date de 2001 et serait tout-à-fait appropriée… si les Etats membres voulaient bien l’appliquer, ce qui n’a jamais été le cas pour l’instant (Elle nécessite une majorité qualifiée au Conseil). Sylvie Guillaume souligne qu’il existe d’autres textes sectoriels, mais pas de véritable politique concertée et globale des migrations, qu’elle appelle de ses vœux.

En attendant elle précise qu’il n’y aura pas de “tsunami” d’immigrés, que les flux de réfugiés resteront tellement limités qu’ils seraient parfaitement absorbables par l’Union. D’autant plus que l’Europe vieillit et a besoin de sang neuf. Qu’en outre elle devra aider de manière plus conséquente au développement des pays émergents. Les personnes qui choisissent l’exil au péril de leur vie ne le font pas de gaieté de coeur : elles fuient l’oppression, la misère, la guerre. Beaucoup repartiront, mais en attendant, l’Union doit au moins leur offrir un accueil digne, à visage humain, pour ne pas rajouter encore aux traumatismes.