La Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) du Parlement européen a adopté lundi 11 mars le rapport de Christophe Clergeau sur le règlement relatif aux matériels de reproduction végétaux (PRM).
L’enjeu était de taille : protéger l’accès et la biodiversité des semences, préserver la qualité des semences et la capacité d’adaptation des filières agricoles pour assurer notre souveraineté alimentaire, mais aussi préserver les droits des agriculteurs de produire pour leur usage, d’échanger des semences, et lutter contre la mainmise des grands groupes agrochimiques sur les semences et les ressources génétiques. Ces objectifs peuvent réunir agriculteurs, citoyens et environnementalistes.
Les votes sur ce rapport ont permis d’adopter la reconnaissance du concept de souveraineté alimentaire de l’Union Européenne (amendement de Compromis 1) et de donner un cadre juridique robuste aux « semences paysannes » : la possibilité pour les agriculteurs de multiplier les semences pour répondre à leurs propres besoins et d’échanger entre eux de petites quantités gratuitement ou à un prix symbolique (amendement de compromis 1). La droite européenne (PPE), le groupe d’extrême-droite ECR et … les centristes de Renew (y compris les macronistes français dont Pascal Canfin) ont tenté de s’y opposer en promouvant le concept « d’autonomie stratégique ouverte », ce qui en bon français veut dire libre-échange, et en cherchant à restreindre la liberté des agriculteurs. Ils se sont montrés ainsi à contre-courant des attentes que les agriculteurs ont exprimées au cours de leur récent mouvement.
La commission ENVI a également reconnu l’importance des semences atypiques (matériaux hétérogènes – qui devront être non OGM et non NGT) et des activités de conservation « dynamique » de la diversité génétique menées par les organisations professionnelles, les centres de recherche, les ONG et autres acteurs de la société civile (amendement de compromis 3 et article 29). Cela concerne toute les « collections » de semences qui sont le réservoir de biodiversité crucial pour affronter l’avenir et mener la transition agroécologique de l’agriculture. L’enregistrement des semences répertoriées devra rester gratuit (amendement de compromis 2) et la propriété intellectuelle qui s’y applique limitée.
Le rapport insiste sur une nouvelle approche de la valeur ajoutée agronomique des nouvelles variétés qui seront inscrites dans les « catalogues », approche qui valorise la performance écologique, l’impact sur les écosystèmes, la préservation des terroirs agricoles, etc. Il prévoit également que les nouvelles variétés pourront être testées dans tous les systèmes de production agricoles, notamment biologique et peu utilisateurs de pesticides (amendement de compromis 4).
Après la non-brevetabilité des NGT adoptée en janvier, ce rapport franchit une nouvelle étape en clarifiant la non-brevetabilité des plantes, des variétés et des traits génétiques.
« Le vote final sur le texte a été serré. À l’évidence, une partie de la droite conservatrice ne saisit toujours pas les enjeux de la protection de la biodiversité comme bien commun de l’humanité. Enfin, la non-brevetabilité du vivant et la liberté des agriculteurs d’échanger librement et de cultiver des semences sans devoir payer en permanence des royalties à des entreprises agroalimentaires qui diminuent leurs revenus, sont des batailles qu’il faut continuer à mener sans relâche en France comme dans le reste de l’Europe. Des organisations de la société civile se sont mobilisées sur ce texte, elles peuvent compter sur moi » a déclaré Christophe Clergeau à l’issue du vote.