Sylvie Guillaume (S&D). – Monsieur le Président, les failles du règlement de Dublin ne sont pas nouvelles. Nous savons que ce système est inefficace, injuste et coûteux. La crise actuelle stigmatise ces dysfonctionnements et rappelle qu’il est urgent de le repenser. Pourtant, la Commission n’a pas fait ce choix. J’en comprends la raison, mais je ne la partage pas.

Deux expressions me viennent en tête pour désigner cette proposition: rafistolage et chiffon rouge. Pourquoi rafistolage? Les fondations du système Dublin devaient être bousculées, elles seront maintenues. La Commission y ajoute une touche de solidarité, en prévoyant un mécanisme ponctuel de relocalisation en cas de crise. Or, le mécanisme de base – la répartition – est le même, et il est défaillant.

Certes, la Commission prévoit des sanctions financières importantes pour les récalcitrants mais, si cette amende se veut dissuasive, on peut légitimement penser que cette solidarité financière est réaliste. À moins que le montant fixé des sanctions financières ne serve aussi de chiffon rouge et se révèle utile pour détourner les projecteurs de certaines dispositions critiquables dans le nouveau règlement. Je pense notamment aux mesures quasi punitives envisagées pour lutter contre les mouvements secondaires des demandeurs.

Je pense également à la primauté des concepts de « pays tiers sûr » et de « premier pays d’asile » avant toute désignation de l’État membre responsable de l’examen. La règle d’or du système Dublin du premier pays d’entrée est non seulement maintenue mais renforcée. Ce mécanisme continuera donc de poser un grand nombre de défis logistiques dans les pays de première ligne pour garantir un examen individuel, une procédure de recours et un accueil digne de ces populations.

Il n’y a pas de solution facile à ce problème mais je ne suis franchement pas certaine que le calcul proposé soit le bon. Le risque, c’est qu’on se retrouve en bout de course avec un système de Dublin inchangé, voire pire, des droits amoindris pour les demandeurs et des dispositifs encore moins lisibles pour les États.