Strasbourg, le 28 septembre 2005 – La libéralisation à marche forcée des chemins de fer européens a été approuvée par le Parlement européen. Les propositions du rapport de Georg Jarzembowski (PPE, Allemagne) visant à libéraliser le trafic international passagers en 2008 et à demander la libéralisation des trafics nationaux d’ici 2012, ont été adoptées par une majorité composite, transversale aux groupes politiques, parfois très étroite, preuve de l’inquiétude manifestée par de nombreux députés lors des débats en séance plénière. La délégation socialiste française a voté contre le rapport Jarzembowski.
Rarement un projet de texte européen n’aura à ce point éludé les questions cruciales, toujours sans réponses claires après plusieurs mois de débats parlementaires; celles de son opportunité, de son urgence et de ses conséquences économiques:
-à la différence du transport ferroviaire de fret, en cours d’ouverture, le trafic passager ne présente pas les mêmes déficiences et blocages aux frontières entre les Etats membres.
– le texte de Georg Jarzembowski propose « une dérégulation sauvage à la Thatcher », à laquelle le Royaume-Uni lui même a renoncé depuis l’arrivée de Tony Blair.
– cette nouvelle étape de libéralisation présente un risque de dépeçage inquiétant des réseaux des pays de petite taille, au profit d’une oligopolisation de l’Europe ferroviaire autour d’un nombre réduit de compagnies dominantes.
En outre, la proposition originale de la Commission européenne pour une libéralisation de l’international passagers en 2010 (seulement) comporte une ambiguïté fondamentale: les formidables enjeux commerciaux attachés au cabotage sur les lignes internationales. En d’autres termes, le marché convoité n’est pas celui des passagers internationaux (peu nombreux) qui se rendent sans arrêt de Paris à Munich, par exemple, mais bien celui des « caboteurs », de la masse des passagers nationaux qui voyagent sur cette ligne, entre Paris et Nancy, Nancy et Strasbourg, Baden-Baden et Munich…
La Délégation socialiste française a donc voté le rejet de la proposition de la Commission européenne, estimant que, dans sa rédaction actuelle, ce texte répond à des enjeux purement commerciaux plus qu’à la construction d’une Europe du rail, régulée et permettant de préserver les obligations de service public et de répondre à des impératifs d’aménagement du territoire ou de politique globale des transports.
« Le vote du Parlement européen est l’apéritif d’un grand festin ferroviaire entre grandes compagnies européennes et n’a pas été exempt d’un fort lobbying de certaines d’entres elles… La balle est désormais dans le camp du Conseil des ministres des Transports qui devra se prononcer sur les amendements du Parlement européen« , a déclaré Gilles Savary, député européen socialiste français et vice-président de la commission parlementaire des transports.