Eurex, filiale du groupe allemand Deutsche Börse, lancera le 16 avril prochain un nouveau contrat à terme sur les obligations souveraines françaises. Le lancement des contrats Eurex entretient l’idée selon laquelle la qualité de la dette française serait susceptible de se dégrader par rapport à celle de la dette allemande.

En présentant un instrument de couverture contre le risque souverain, ce contrat à terme permettra en réalité aux investisseurs de parier sur la hausse ou la baisse des titres obligataires français et risque de favoriser une prophétie autoréalisatrice, de la même façon que les fameux Credit Default Swaps, (CDS), sur lesquels le Parlement européen a arraché un encadrement réglementaire digne de ce nom en novembre dernier. Ces nouveaux produits indiquent qu’Eurex anticipe une spéculation contre la dette française alors même que les tensions exercées sur les marchés souverains ne cessent de s’exacerber, l’Espagne ayant dû s’acquitter d’un taux usurier de 6% pour couvrir ses besoins de financement.

La multiplication de ce type de contrats à terme adossé aux obligations souveraines n’est pas neuve : ainsi, un contrat à terme lié à la dette italienne a été créé en 2009, sans remporter le succès escompté. Une telle initiative acte une fragmentation croissante du marché des capitaux européens et hypothèque un peu plus la création d’euro obligations, c’est-à-dire la mutualisation des dettes souveraines des pays membres de la zone euro fondée sur une responsabilité conjointe et solidaire.

Alors même que l’Union européenne s’enfonce un peu plus dans la récession, la droite européenne continue à refuser à l’autorité européenne des marchés financiers (AEMF) les moyens de garantir les fondations d’un marché européen de la dette souveraine. Les initiatives d’acteurs financiers privés pariant sur l’accroissement des divergences économiques entre pays de la zone euro doivent être combattues. Il est temps que la démocratie reprenne ses droits face aux innovations des apprentis sorciers de la finance.