Sylvie Guillaume (S&D). – Madame la Présidente, Madame la Commissaire, tout d’abord, je souhaite moi aussi saluer l’ouverture dont le gouvernement et le peuple tunisien ont fait preuve, ces derniers mois, à l’égard de dizaines de milliers de personnes réfugiées, et ce, alors même que ce pays traversait les turbulences d’une révolution.

 

D’ailleurs, par incidence, je veux indiquer qu’il aurait été important que notre Parlement célèbre de manière plus visible ce formidable changement qui a eu lieu en Tunisie. Je profite donc de ce moment pour dire combien je souhaite que les élections du mois prochain soient un réel succès démocratique et populaire.

 

J’en reviens aux réfugiés présents sur le territoire tunisien. Mes collègues d’autres groupes et moi-même avons fait un déplacement, en juillet, comme il vous l’a été dit. Nous sommes allés particulièrement au camp de Choucha, à la frontière de la Libye. C’est un endroit où près de 20 000 personnes par jour ont trouvé refuge, au plus fort de la crise. Ils ont subi, tous, des conditions de vie extrêmement difficiles.

 

Après les évacuations dont vous avez fait mention, Madame, dans les pays d’origine, plus de 5 000 personnes, qui ont reçu la qualification de « réfugiés » de l’UNHCR – et ceci est incontestable –, 5 000 d’entre elles sont donc encore bloquées dans des camps comme celui-ci. Elles n’ont pas de perspectives de retour chez elles, dans des pays en proie aux persécutions, à la guerre, à la famine, aux violences, quand leur pays existe encore. Mais elles ne trouvent pas non plus de solutions dans d’autres pays, car la plupart des États membres de l’Union restent sourds et muets sur le renforcement des dispositifs de réinstallation.

 

Nous avons tous, à peu près, les mêmes chiffres, les mêmes sources. Pour les citer: pour 2 400 personnes, dont le retour à la réinstallation a été validé à la mi-septembre, seules 650 places ont été proposées, moins de la moitié dans les États membres, et en bout de course un peu moins de 200 réfugiés ont effectivement été réinstallés ailleurs. Bien sûr, il faut féliciter les États membres, et également la Norvège, qui ont fait ces propositions. Mais de nombreux États membres – et non des moindres, en taille et en puissance – n’ont fait absolument aucune proposition de réinstallation pour ces réfugiés de Libye. Pas une, vous entendez! Ils arguent du fait qu’ils sont déjà très actifs dans le processus de réinstallation courante. On va dire au fil de l’eau. Encore faudrait-il que ce soit vrai, ce qui n’est pas le cas! Il y a donc de quoi être vraiment très en colère devant un tel cynisme.

 

De plus, une absence de réaction et de perspective en matière de réinstallation a une conséquence directe et dramatique. Sans espoir de retour chez eux, ces réfugiés sont poussés dans les bras des passeurs pour prendre la mer et tenter le tout pour le tout, au risque de leur vie! Alors, la question qu’il faut poser est finalement assez simple: Combien de morts en mer faudra-t-il pour que les États membres réagissent enfin?

 

À l’heure de la célébration du soixantième anniversaire de la Convention de Genève – comme vous y avez fait allusion, Madame –, nous sommes nombreux à penser que les États membres de l’Union européenne ont une responsabilité particulière envers les réfugiés. Il faut qu’ils fassent des propositions de réinstallation et qu’ils le fassent vite. Vous nous trouverez à vos côtés pour faire ainsi pression!