Pervenche Berès, auteure. − Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, chers collègues, une année déjà s’est écoulée depuis que la Commission européenne a publié son projet pour une union économique véritable et approfondie. Plus d’un an s’est également écoulé depuis que le Parlement européen s’est exprimé, dans sa résolution du 12 octobre 2012, en faveur de l’instauration d’indicateurs de référence en matière sociale, afin de compléter la gamme d’indicateurs économiques analysés pour détecter les déséquilibres macroéconomiques susceptibles d’apparaître au sein de la zone euro.

 

Le Parlement européen ne peut donc que se réjouir de la communication de la Commission européenne, publiée le 2 octobre 2013, dans cette affaire qui concerne l’avenir du modèle social européen, dont – nous nous en souvenons – le Président Barroso nous avait dit qu’il s’agissait d’un élément de la compétitivité de l’Europe. Mieux vaut tard que jamais! Sans les demandes insistantes de ce Parlement et sans l’engagement constant du commissaire Andor au sein du collège, cette communication n’aurait manifestement pas vu le jour.

 

La mise en place d’un tableau de bord permettant d’identifier en amont les divergences sociales au sein de la zone euro marque une avancée significative sur la voie de l’intégration solidaire et le début du rééquilibrage nécessaire entre les politiques économiques et sociales. Nous considérons que ces indicateurs doivent nous permettre d’infléchir les politiques pour tenir compte de la réalité des divergences, non seulement en termes macroéconomiques, de déficit public et de dettes, mais aussi des divergences sociales, qui sont tout aussi insoutenables que les précédentes pour le futur de la zone euro.

 

Cependant, ce mécanisme doit évidemment être bien conçu, dans la sélection des indicateurs comme dans leur définition. Il serait inefficace de les limiter à un nombre d’indicateurs trop restreint qui ne couvrirait pas, par exemple, la question du travail décent, de l’accès à la santé ou au logement. Permettez-nous de nous étonner du seuil de 25 ans retenu au regard des emplois jeunes, alors que nous nous sommes mis d’accord, dans le cadre de la « garantie jeunesse », pour traiter la situation des emplois des jeunes jusqu’à 30 ans. Il ne s’agit peut-être que d’un ajustement à opérer.

 

Mais, au-delà de tout cela, il faudra examiner la manière dont ces indicateurs seront utilisés. Quels enseignements seront tirés de ce que nous révéleront ces indicateurs? Quant à leur définition, nous vous proposons d’y associer pleinement les partenaires sociaux, qui ont des choses à dire sur la façon d’observer cette réalité et sur les enseignements à en tirer. Nous vous invitons à le faire de façon très systématique et très engagée.

 

Avec cette communication, vous avez ouvert, en filigrane, un autre débat sur de la question des stabilisateurs automatiques. J’ai cru comprendre qu’y compris dans ce Parlement, ce sujet était devenu objet de débat. Or, les chiffres sont là et manifestement, depuis 2010, au sein de la zone euro, comme nous le savons, les stabilisateurs automatiques ont été fragilisés. Il nous faudra sans doute les reconstruire à l’échelle de l’Union européenne et la piste ouverte par la « garantie jeunesse » pourrait être, si elle était vraiment financée au niveau européen, un moyen de progresser vers une véritable protection sociale européenne. La mise en place de ce stabilisateur automatique est aujourd’hui fragilisée au niveau des États membres, en particulier, dans la zone euro.

 

Monsieur le Commissaire, permettez-moi d’insister sur deux des questions que la commission a souhaité vous poser. La première est de savoir comment cette communication sera intégrée dans l’ensemble de la problématique, telle qu’elle est aujourd’hui posée sur la table du Conseil, s’agissant de la marche vers une véritable union économique et monétaire. La deuxième question est de savoir comment la Commission entend progresser sur le sujet des stabilisateurs automatiques et, en particulier, sur la possibilité d’élaborer et de rédiger un livre vert à ce sujet.

 

Je conclurai en indiquant que pour certains d’entre nous, il s’agira bien évidemment d’aller au-delà; mais chaque chose en son temps. Enfin, peut-être faudra-t-il aborder aussi la question de la définition d’un salaire minimum en tant qu’élément fondamental d’une dimension sociale de l’Union économique et monétaire.