Patrice Tirolien, rapporteur. − Monsieur le Président, je tiens à remercier les collègues de la commission du développement, la Commission et nos partenaires de la société civile pour le précieux concours qu’ils ont apporté à ce texte.

Le 11e FED s’inscrit dans un contexte particulier puisqu’il s’agira du dernier sous les accords de Cotonou. Par ailleurs, il intervient au moment où l’Union réforme en profondeur sa politique de développement. Enfin, le 11e FED sera mis en place alors que 2015 marquera la redéfinition des objectifs mondiaux en matière de développement.

Sur ce dernier point, je remarque qu’à moins de deux ans de l’échéance que de nombreux objectifs ne seront probablement pas atteints. Les chiffres sont là pour attester de l’importance des défis à relever, puisqu’au moment où nous parlons, 1,4 milliard de personnes, soit environ 20 % de la population mondiale actuelle, vivent dans une situation de pauvreté extrême. Plus de 2,6 milliards de personnes n’ont pas accès à des sanitaires et environ 1 milliard manque d’eau potable. Et la faim chronique touche plus de 800 millions de personnes, dont la plupart en Afrique subsaharienne.

Voilà pourquoi, à l’instar de l’ICD, notre Parlement souhaite qu’au moins 20 % des fonds du prochain FED ACP soient utilisés pour satisfaire les besoins sociaux de base que sont la santé, l’éducation, l’accès à l’eau et l’assainissement.

Suivant cette constatation, nous ne pouvons que déplorer le montant de l’enveloppe du FED, tel que décidé voici un mois par le Conseil. Aussi nous espérons que l’impératif de flexibilité et de réexamen à mi-parcours, que notre Assemblée appelle de ses vœux pour le prochain cap financier pluriannuel, permettra aussi au FED d’être évalué à la hausse d’ici à 2017.

La budgétisation est devenue une nécessité, pas seulement pour des raisons évidentes de contrôle démocratique, mais aussi pour renforcer la visibilité et la cohérence des actions extérieures de l’Union. La Commission doit donc arrêter de tergiverser et présenter une feuille de route claire, détaillant un calendrier pour la budgétisation du FED après 2020.

Ce contexte de forte contrainte budgétaire doit nous inciter à avancer le plus rapidement possible dans la mise en place de financements innovants. La taxe sur les transactions financières récemment adoptée par les onze États membres doit devenir une source de recettes pour l’aide au développement.

Heureusement, il y a d’autres moyens de renforcer notre engagement envers les pays en développement. L’agenda pour le changement a donné quelques pistes avec, notamment, le soutien au secteur privé ou le mixage prêt/don. Pour le secteur privé, nous souhaitons que les ressources du 11e FED qui lui sont consacrées soient prioritairement utilisées pour soutenir les entreprises locales afin de faire émerger les savoir-faire dans les pays ACP. Dans le cas contraire, le risque est grand de favoriser un développement et une croissance qui ne seraient ni soutenables ni inclusifs ni équilibrés. Pour le mixage prêt/don, le 11e FED disposera du mécanisme de facilité d’investissement dont le plafond a été largement augmenté par rapport au 10e FED.

Par ailleurs, concernant la différenciation, nous disposons, avec l’accord de Cotonou, d’un cadre qui nous impose de proposer une enveloppe nationale à tous les pays ACP. Et quel que soit leur niveau de développement. Je trouve cela capital. Si ces pays disposent de moyens intéressants pour présider à leur propre développement, ces pays concentrent la majorité des populations pauvres de la planète. Voilà pourquoi nous devons rester à leurs côtés afin qu’ils réalisent la transition indispensable qui leur permettra de réduire durablement les inégalités.

Voilà pourquoi je suis pour ma part persuadé que l’aide au développement communautaire peut encore avoir une valeur ajoutée dans certains pays à revenus moyens sur des points précis, comme des réformes fiscales ou la mise en place de systèmes de sécurité sociale. Ces pays sont d’une importance capitale du point de vue diplomatique pour atteindre nos objectifs internationaux, en matière de lutte contre les changements climatiques, par exemple.