Madame la Présidente, Madame la Commissaire, chers collègues,

je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement l’ensemble des acteurs avec lesquels j’ai pu échanger sur ce dossier.

 

Toutes les contributions ont été utiles à l’élaboration de ce rapport et grâce à la coopération de l’ensemble des groupes politiques, dont je remercie en particulier les rapporteurs fictifs, nous avons aujourd’hui sur la table un texte cohérent et porteur d’un message fort.

 

Nous sommes en effet à un tournant de la politique d’investissement européenne, à un moment où nous devons nous saisir de la nouvelle compétence que nous confère le traité de Lisbonne pour réaliser un double défi. Il s’agit d’abord de donner les outils nécessaires aux entreprises européennes pour effectuer à l’étranger des investissements de qualité et sécurisés par un cadre juridique permettant un accompagnement à long terme.

 

Par ailleurs, l’Europe doit conforter sa place de premier récipiendaire mondial d’investissements directs étrangers et se donner les moyens de les contrôler pour encourager un développement durable et créateur d’emplois de qualité.

 

En votant ce rapport, première expression officielle de notre institution depuis la mise en œuvre du traité de Lisbonne, le Parlement prend toute sa place comme nouveau colégislateur en matière de réglementation commerciale et exprime ses priorités à un moment où les premières négociations sur la protection des investissements sont sur le point d’être lancées. Cette expression est essentielle car elle se veut le relais des préoccupations des citoyens, dont l’intérêt pour les questions commerciales est croissant et que nous devons accompagner.

 

Aujourd’hui, dans un monde où les conflits se jouent également au niveau commercial, la protection de nos entreprises qui investissent à l’étranger doit être une priorité. Des accords internationaux ont été créés pour protéger les investisseurs contre des expropriations rutales et injustifiées, contre des législations déguisées ne visant qu’à les éliminer de tel ou tel marché. Et cette vocation première doit être maintenue.

 

Alors que l’Europe est l’un des marchés les plus ouverts du monde, un équilibre doit être rétabli avec nos principaux partenaires, afin que les entreprises européennes bénéficient de conditions de concurrence équivalentes. C’est ce que propose ce rapport, en insistant sur la nécessité d’inclusion, dans les futurs accords, de standards de non-discrimination, de traitement juste et équitable et de protection contre l’expropriation directe et indirecte.

 

Cependant, ces standards doivent être définis de telle manière à éviter toute interprétation abusive. Certaines entreprises ont en effet utilisé les formulations vagues des premières générations d’accords d’investissement pour défendre leur intérêt au-delà de ce qui était légitime, par exemple en attaquant de nouvelles législations sociales ou environnementales nuisant à leur intérêt. Devant des arbitres internationaux et sans transparence ou possibilité d’appel, elles ont demandé des dédommagements considérables en considérant que ces législations équivalaient à des expropriations indirectes. L’Europe qui, demain, recevra toujours plus d’investissements, en particulier en provenance des pays émergents, doit se prémunir contre de telles dérives.

 

C’est le sens des réformes engagées par les États-Unis et le Canada, deux pays dont les gouvernements ou les collectivités ont subi plusieurs revers dans des cas d’arbitrages internationaux et qui ont revu en profondeur leur modèle d’accord d’investissement.

 

En proposant de nouvelles définitions des standards de protection, le rapport fixe un juste équilibre entre la protection des droits des investisseurs et le droit des autorités publiques de réglementer. Cela implique également d’intégrer dans tous les futurs accords des clauses spécifiques qui précisent la possibilité pour la puissance publique de légiférer et de réglementer dans les domaines de la sécurité de l’État, de l’environnement, de la santé publique, des droits des travailleurs et des consommateurs, de la politique industrielle ainsi que de la diversité culturelle.

 

Enfin, la protection accrue des investisseurs doit s’accompagner d’un comportement plus responsable, en particulier dans les pays en développement, dont les législations sociales et environnementales sont moins contraignantes. C’est pourquoi le rapport rappelle que des clauses sociales et environnementales doivent être intégrées dans tous les accords de libre-échange signés par l’Union. De surcroît, il faut savoir aller au-delà du blaming and shaming et intégrer à tous les futurs accords un ensemble de règles claires que les entreprises devront respecter en matière de responsabilité sociale des entreprises sur la base des lignes directrices fixées par l’OCDE.

 

S’il s’agit réellement, ici, de dessiner les contours d’une nouvelle politique d’investissement européenne, j’appelle, par ce rapport, à ce qu’elle soit exemplaire, qu’elle promeuve des investissements durables, respectueux de l’environnement et favorisant des conditions de travail de qualité en Europe comme dans les pays tiers. C’est pourquoi ce rapport doit être, par la force que lui donnera le vote mercredi, un élément de référence pour toutes les futures négociations que mènera la Commission.