La Commission européenne vient de donner son feu vert juridique au lancement de l’Initiative citoyenne européenne sur la taxation des grandes fortunes pour financer la transition écologique.

Initiée par la députée européenne, Aurore Lalucq, et le président du parti socialiste belge, Paul Magnette, cette ICE vise à récolter au moins 1 million de signatures en Europe, ce qui conduirait la Commission européenne à formuler une proposition sur l’instauration d’un impôt européen sur la grande fortune.

Comme l’explique Aurore Lalucq, économiste et eurodéputée Place publique, « On assiste depuis plusieurs décennies à une course au moins-disant fiscal au profit des ultra-riches. Ceux-ci ont les moyens de recourir à des montages fiscaux et bénéficient d’une fiscalité très avantageuse sur le capital. Au final, ces ultra-riches sont relativement moins taxés que le reste des contribuables. Et ce sont autant de ressources qui manquent aux États pour mettre en œuvre la transition écologique et sociale. C’est la raison pour laquelle la question de la taxation sur la grande fortune revient aujourd’hui dans le débat public. ».

La validation de l’Initiative Citoyenne Européenne et l’organisation du débat Tax the rich au Parlement européen lors de cette session plénière montrent qu’avec un peu de volonté politique on peut inverser la vapeur et rétablir de la justice fiscale, une question non seulement économique mais aussi démocratique.

« Le but avec cette ICE est de pousser la Commission à agir pour répondre à ce besoin de justice fiscale et sociale. C’est la première étape d’un processus que nous avons enclenché l’année dernière en appelant, avec plus de 120 députés européens, chercheurs et millionnaires, à la mise en œuvre d’un accord international sur la taxation des grandes fortunes. Nous avons montré que c’était possible avec la mise en œuvre de l’accord OCDE sur la taxation minimale des multinationales. Notre objectif est de répliquer ce succès avec un accord sur la taxation des ultra-riches » ajoute Aurore Lalucq.

« Le temps est venu d’œuvrer pour le bien commun, de lutter contre les inégalités et d’investir massivement pour la transition écologique et le renouveau de nos services publics. Pour cela, il va falloir trouver de l’argent et cela commence par la juste imposition des plus grandes fortunes » conclut l’eurodéputée.

 

 

 

 

 

Pour aller plus loin : l’instauration d’un impôt européen sur la grande fortune nécessiterait trois interventions législatives.

 

  • une proposition de directive portant création d’un impôt européen sur la grande fortune, sur le fondement de l’article 115 TFUE. Cet article permet au Conseil, statuant à l’unanimité, d’arrêter des directives pour rapprocher les législations nationales, notamment dans le domaine de la fiscalité directe, dès lors que celles-ci ont une incidence directe sur l’établissement ou le fonctionnement du marché intérieur. Or, les disparités nationales quant à l’imposition des ultra-riches sont susceptibles d’alimenter une concurrence fiscale accrue au sein de l’Union et créent des distorsions au sein du marché intérieur. Au sein du marché intérieur, il est dès lors nécessaire d’adopter des approches stratégiques communes et de mener une action coordonnée afin d’optimiser l’incidence positive d’une imposition sur la grande fortune.

 

  • une modification de la décision 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système de ressources propres de l’Union européenne, sur la base de l’article 311, alinéa 3, TFUE. Cette modification aura pour objet de permettre à l’impôt européen sur la fortune de contribuer au régime des ressources propres de l’Union européenne. Une telle modification répondrait, par ailleurs, à la volonté manifestée par les institutions européennes depuis 2020 d’ajouter de nouvelles ressources propres, notamment en vue de faire face au remboursement des engagements financiers contractés par la Commission en vue de financer le plan de relance européen, RRF.

 

  • des propositions de règlements afin de renforcer le fonds pour la facilité et la résilience (RRF), les fonds liés au Green Deal et à la politique de cohésion. Il s’agira notamment de modifier les règlements de base de ces fonds à savoir respectivement les règlements 2021/1056, 2021/241 et de se fonder sur la politique de cohésion (article 175, 3 TFUE). Éventuellement, d’autres bases juridiques pourraient être mobilisés à cette fin, telles que les dispositions en matière d’environnement (article 192, § 1er, TFUE), d’emploi et de politique sociale (articles 149 et 153 TFUE) et de coopération au développement (art 209 TFUE).

 

 

Prochaines étapes

 

À la suite de l’enregistrement de l’ICE ce mardi 11 juillet 2023, nous disposons d’un délai de six mois pour lancer le processus de collecte de signatures. Si, en l’espace d’un an, l’ICE recueille un million de déclarations de soutien provenant d’au moins sept États membres différents, la Commission devra réagir. Elle pourra décider de faire droit ou non à la demande et serait tenue de motiver sa décision.