Dans un grand entretien accordé à Energies actu, l’eurodéputée socialiste, membre de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (ITRE), revient sur les objectifs européens en matière d’énergie.

Existe-t-il une politique européenne de l’énergie? 

On peut identifier en réalité deux sillons parallèles : le développement du marché intérieur de l’énergie, à la fois pour le gaz et l’électricité, souvent perçu comme le « grand œuvre » de l’échelon européen. Et un certain nombre de choix stratégiques, en particulier en matière de technologies et de sources d’énergie -la définition du bouquet énergétique-, qui eux demeurent dans le giron national.

Or l’addition des politiques nationales, même dans un cadre commun comme celui du marché intérieur, ne fait pas une politique européenne.

Quels sont les objectifs européens en matière d’énergie? 

A l’échelle de l’Europe, l’objectif des instruments de régulation économique a été de créer un marché intérieur qui peine à émerger malgré des échanges transfrontaliers croissants, les marchés et les bouquets nationaux demeurant très différents les uns des autres.

A titre d’exemple, chez les « anciens » Etats-Membres (UE15), le pétrole est la première source d’énergie (38%), alors que pour les pays arrivés plus tard, le charbon domine toujours (39%). Chez ces derniers, 56% de l’électricité reste produite à partir de ce combustible (jusqu’à 90% pour la Pologne!), alors qu’il ne représente que 22% chez les « anciens ».

« LA DEPENDANCE ENERGETIQUE DE L’EUROPE S’EST ACCRUE »

L’indépendance énergétique est un autre objectif, fortement réaffirmé après la « crise du gaz » de l’hiver 2009. Mais les mesures prises ont essentiellement consisté en la création d’un mécanisme de solidarité d’urgence et un renforcement du réseau de transport de gaz (pour connecter les « îlots énergétiques » comme les pays baltes), sans réellement changer la donne vis-à-vis de nos principaux fournisseurs, en particulier la Russie.

D’autres mesures, comme l’idée évoquée régulièrement d’une centrale d’achat, n’ont pas rencontré le soutien politique nécessaire. Et de fait, statistiquement la dépendance énergétique de l’Europe s’est accrue : sur base UE27, les importations totales d’énergie comptaient pour 1% du PIB européen en 1999, et grimpaient en 2011 à 3,9% de ce même PIB. Ce faisant, l’UE s’expose à la volatilité des prix (en hausse tendancielle), et subit en plus un effet volume (qu’il est davantage possible -et souhaitable- de maîtriser).

Pour revenir aux infrastructures, le « Mécanisme européen d’interconnexion » doit voir une partie de son enveloppe dédiée aux installations énergétiques et générer un effet levier important. Malheureusement, l’enveloppe totale de ce MEI (qui comprend aussi des volets transport et TIC) a été rabotée dans l’accord entre Chefs d’Etats et de gouvernements sur le Cadre financier pluriannuel 2014-2020, début février.

L’UE s’est aussi engagée en faveur des énergies renouvelables, non ?

En parallèle à l’édification de son marché intérieur, l’Union a pris des engagements dans son paquet Climat de 2008, en particulier les fameux « 3×20 »: à horizon 2020, baisse de 20% des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, part de 20% de renouvelables dans la production (petite entorse à la souveraineté nationale sur le mix énergétique), augmentation de 20% de l’efficacité énergétique.

Ce dernier objectif a fait l’objet d’une directive additionnelle spécifique adoptée l’an dernier, après des négociations houleuses entre le Parlement européen qui souhaitait à la fois un objectif contraignant à l’échelle de l’Europe et une liste de mesures obligatoires (rénovation des bâtiments, cogénération, smart grids…), et les Etats-membres qui en majorité ne souhaitaient pas se lier les mains à ce point. Au final le compromis a porté sur des objectifs nationaux indicatifs s’inscrivant dans une « trajectoire européenne » à l’horizon 2020, assortis d’une liste de mesures.