La Commission européenne a présenté hier son projet de Cadre Financier Pluriannuel pour 2028-2035. Pour la délégation française du groupe S&D, une chose est claire : ce budget est inacceptable. Il ne répond ni aux enjeux du moment ni à la préparation de l’avenir, et est en rupture avec l’esprit même du projet européen.

1/ Un budget inconséquent face à l’Histoire

Alors que l’Europe est confrontée à des défis existentiels – guerre sur notre continent, urgence écologique, crise sociale, accroissement dramatique des inégalités et montée des extrêmes – la Commission répond par un budget qui cache des coupes sévères en actant au passage une centralisation inédite.

Le volume de ce budget rendrait l’Union européenne dépourvue des moyens nécessaires pour asseoir sa puissance et faire face aux nouveaux enjeux de défense, écologiques, sociaux et de sécurité sanitaire. Non seulement il reste en réalité au même niveau que le précédent (1,15% du RNB européen pour 1,13% entre 2021 et 2027) mais il est même en forte baisse si l’on additionne au cadre actuel les mesures de sortie de crise COVID de Next Generation EU (de 1,75% du RNB sur 2021-2027 à 1,15 sur 2028-2034). Pour les fonds sociaux, la cohésion et la PAC, ce ne sont rien de moins que des baisses massives par rapport à l’actuel.

Ce n’est pas un budget de combat. C’est un budget de renoncement et de capitulation. Nous nous battrons pour un budget à la hauteur des enjeux, appuyé sur les nouvelles ressources propres que la Commission propose, et que nous soutenons, refusant qu’elles soient accompagnées par une baisse des contributions existantes (dont celle de la France!) dans un jeu à somme nulle aussi absurde qu’irresponsable.

2/ Une architecture qui tourne le dos à la solidarité et à la démocratie

Derrière des discours technocratiques sur la « simplification » se cache en réalité une recentralisation autoritaire dans les mains de la Commission européenne. Le projet de CFP fusionne des fonds européens historiques pour les remplacer par un chèque unique par État membre au détriment des régions, des acteurs locaux et du Parlement européen qui représente les citoyens, les privant ainsi de toute supervision démocratique.

Pire encore : la Commission propose un cadre budgétaire qui persiste dans la logique mortifère et ultralibérale « argent contre réformes”. Comme si la Commission se muait en FMI, un État membre pourrait se voir privé de fonds européens s’il n’applique pas certaines injonctions ou réformes néolibérales, ouvrant la voie à tous les reculs sociaux et aux plans d’austérité. Plutôt que la solidarité et la cohésion, la Commission place le chantage au cœur même de son dispositif.

3/ Nous demandons à la Commission de revoir ce budget de fond en comble

Ce projet de Cadre Financier Pluriannuel n’est pas une base de travail et de négociation acceptable pour nous. Ce texte piétine la gouvernance partagée, affaiblit les politiques de cohésion et agricoles, et dépossède le Parlement de ses prérogatives budgétaires. Ce projet de CFP représente une rupture majeure, tournant le dos à un financement basé sur la solidarité européenne.

Nous avons une autre vision, qui sera portée collectivement dans nos commissions respectives et dans celle des Budgets par Jean-Marc Germain, chef de file du Groupe Socialistes & Démocrates sur ces questions :

  • un budget à la hauteur de nos ambitions et de nos défis communs ;
  • plus de ressources propres issues d’une fiscalité juste ;
  • des politiques co-construites avec les territoires et les citoyens, transparentes et démocratiques.

Alors que le budget présenté par le gouvernement français imposerait déjà des sacrifices inacceptables aux citoyens et aux collectivités, nous ne pouvons laisser passer ce projet de Cadre Financier Pluriannuel européen qui, en cumulé, décuplerait les effets négatifs et ferait porter une double peine à nos concitoyens.

Parce que ce projet de CFP signerait la fin de l’Europe solidaire de Jacques Delors, nous appelons la Commission européenne à revoir ce budget de fond en comble. Nous le refusons en l’état, et nous nous battrons pour qu’il change pour répondre aux urgences de notre temps et aux besoins de nos concitoyens et de tous nos territoires, sans quoi il n’y aura pas de majorité pour le voter.