François Kalfon, membre de la commission des transports, rapporteur pour le groupe S&D sur la mobilité militaire
La Commission européenne a lancé, le 19 novembre 2025, un paquet “mobilité militaire” pour accélérer le déplacement des troupes, équipements et matériels à travers l’Union : l’objectif est clair, construire un véritable “Schengen militaire”.
Au Parlement européen, le débat a eu lieu mardi 16 décembre et le vote d’un rapport d’initiative sur le sujet aura lieu aujourd’hui mercredi 17 décembre 2025 en session plénière à Strasbourg. Ce vote est historique, car ce rapport constitue le premier texte du Parlement européen consacré à une approche holistique de la mobilité militaire : non plus seulement les questions d’infrastructures (en lien avec la ligne budgétaire dédiée du MIE-Transports), mais aussi les blocages administratifs à lever pour faciliter le déplacement transfrontalier de troupes et de matériel, illustrant ainsi la prise de conscience croissante des Européens quant à l’importance stratégique de la logistique militaire.
Nous le disons simplement : la logistique est le nerf de la guerre. Mais la souveraineté est le nerf de la paix. Accélérer les autorisations de mouvements transfrontaliers, harmoniser les procédures, déployer des outils numériques : chaque heure gagnée peut sauver des vies. Le paquet prévoit notamment un délai maximal de 3 jours ouvrables pour traiter les autorisations en temps normal, des procédures douanières et administratives simplifiées. En situation d’urgence, le dispositif sera encore renforcé : les convois militaires auront un accès prioritaire aux infrastructures ; il prévoit également un renforcement de la résilience et de la cybersécurité des infrastructures critiques. Enfin, une “réserve de solidarité” européenne regroupant avions, wagons et camions sera mise à disposition des armées.
Mais il manque encore une pièce maîtresse : la préférence européenne. On peut fluidifier les frontières — très bien. Si, dans le même temps, on laisse nos ports, nos rails, nos systèmes numériques, nos composants critiques dépendre de pays tiers, alors nous restons vulnérables.
Notre ligne rouge est simple : confier nos infrastructures stratégiques à des puissances étrangères, c’est laisser la clé de la maison sur la porte. C’est non.
Au Parlement européen, nous poussons donc des exigences claires :
– Préférence européenne pour la production, la maintenance et l’achat des composants critiques des matériels et infrastructures stratégiques ;
– La reprise du contrôle de nos matériels : prévention des risques de contrôle, d’ingérence ou de désactivation à distance des équipements et systèmes critiques ;
– Cybersécurité et résilience : des obligations concrètes, vérifiables, appliquées partout, et pas seulement des slogans.
Ce Schengen militaire est un premier pas qui en appelle d’autres, rapides, pour renforcer notre souveraineté dans un monde plus instable et dangereux jour après jour.