Isabelle Thomas, au nom du groupe S&D. – Monsieur le Président, Madame la Vice- présidente, mes chers collègues, j’aurais aimé pouvoir également saluer le Conseil, car nous débattons aujourd’hui d’une résolution qui répond au paquet législatif présenté par la Commission sur la révision du cadre financier pluriannuel, et parce que ce sera évidemment un partenaire essentiel.
Ce projet de révision de la Commission confirme la lucidité du Parlement quant à la nécessité de procéder à une véritable révision. Je vous en remercie, Madame la Vice- présidente. C’est une première budgétaire dans l’histoire de l’Union européenne et je salue la position de la Commission qui, comme le Parlement, constate après examen que l’on ne peut pas continuer avec le cadre actuel.
C’est une première victoire qui en appelle d’autres. Pourtant, il y a un absent de poids: le Conseil, qui devrait être parmi nous pour présenter sa position et écouter celle des parlementaires.
Le Conseil doit rapidement nous présenter sa position sans attendre le dernier jour de la conciliation, au risque de retarder la procédure budgétaire. Nous souhaitons donc pouvoir, sans tarder, nous asseoir ensemble autour d’une même table pour ouvrir ces négociations.
Que contient la résolution présentée demain au vote des parlementaires? Elle met en lumière une certaine convergence de vues des trois institutions sur les priorités de l’Union européenne: la lutte contre le chômage des jeunes, les mesures concernant les migrations et les réfugiés, la COP 21, les crises agricoles, le sous-investissement et la sécurité intérieure.
Le débat concerne les grandes priorités européennes. Or, ce débat n’est plus à faire. En effet, je crois qu’aujourd’hui, nous nous exprimons d’une même voix. La question maintenant est de savoir si l’on en reste à des déclarations ou si l’on se donne les moyens financiers.
Le projet de révision de la Commission apporte certaines solutions, notamment sur la flexibilité, qui permet une meilleure utilisation de l’ensemble des moyens du cadre financier. Arrachés de haute lutte par le Parlement européen lors des négociations de 2013, ces instruments de flexibilité se sont révélés salvateurs lors des premières années d’exécution du CFP pour faire face aux événements imprévus et aux crises que nous traversons. Comment aurait-on pu prévoir, en 2013, le phénomène migratoire actuel, le Brexit ou encore les nouveaux défis de sécurité intérieure?
Ces outils de flexibilité ont été très fortement sollicités et, sans révision, ils ne suffiront pas, tout simplement, à tenir les engagements que nous avons pris devant nos concitoyens européens.
Notre résolution accueille favorablement les propositions de la Commission concernant les extensions de flexibilité, même si nous pensons qu’il sera nécessaire d’aller plus loin, notamment pour le renforcement de la réserve d’aide d’urgence et de l’instrument de flexibilité.
En ce qui concerne la réserve de crise de l’Union, nous nous félicitons que cette idée, proposée par le Parlement – vous l’avez dit, Madame la Vice-présidente –, soit reprise par la Commission. Il faudra réfléchir encore à son périmètre et à son financement. La flexibilité budgétaire n’est ni un luxe ni un caprice, cela a été démontré. Il s’agit d’un outil performant, dans une programmation budgétaire de longue durée, qui vise à répondre à des situations que nous ne pouvons anticiper. Nous soutenons également les propositions d’utilisation des dégagements d’office à l’intérieur du budget européen. Ces crédits destinés à être dépensés au titre du budget de l’Union doivent logiquement être maintenus dans ce budget et ne pas en sortir. Quant aux paiements, nous l’avons dit en juillet, la politique de l’autruche nous conduirait à de graves déconvenues en fin de période. Nous devons assumer nos responsabilités. Il en va de la crédibilité des institutions européennes, mais, plus grave encore, de la situation des bénéficiaires, que ce soit les collectivités territoriales, les entreprises ou encore les étudiants jouissant de la mobilité Erasmus, qui se retrouveraient à attendre que l’Union européenne soit en mesure de payer les factures qui leur sont dues. Ce déficit caché, si je puis me permettre l’expression, est contraire au traité. La révision doit permettre de régler cette question par un calcul, hors des plafonds, des instruments spéciaux et par une nouvelle flexibilisation de la marge globale des paiements.
Les solutions sont sur la table et la discussion doit maintenant s’ouvrir avec un objectif commun: chaque facture de l’Union doit être payée en temps et en heure. Cependant, permettez-moi quand même de formuler quelques critiques. Nous regrettons notamment que le projet de la Commission ne propose pas de relever les plafonds de dépenses pour la rubrique 1a sur la compétitivité pour la croissance et l’emploi, la rubrique 1b sur la cohésion économique, sociale et territoriale et les rubriques 3 et 4. Il faut sortir de l’impasse des annonces sans financement. Je ne prendrai qu’un exemple: la lutte contre le chômage des jeunes. C’est une priorité partagée. La Commission vient d’évaluer positivement l’initiative pour l’emploi des jeunes, reconnue comme une réussite, pas totale mais ce n’est jamais le cas. Pourtant, alors que les six milliards de crédits de ce programme sont épuisés, la proposition de la Commission ne prévoit qu’un milliard d’euros de renforcement jusqu’à 2020. C’est notoirement insuffisant face au drame que vivent 25 % des jeunes Européens de moins de 25 ans. Il faut a minima ajouter le même montant, soit six milliards d’euros pour la fin de la période budgétaire.
Le débat sur le fond de la révision ne fait que commencer. Au Parlement, nous sommes prêts à ouvrir les négociations. Nous savons que la Commission l’est également. Nous n’attendons plus que le Conseil et, comme nous l’avons dit en juillet, et comme nous le réitérons dans la résolution qui, j’espère, sera votée demain, le Parlement souhaite conduire en parallèle les négociations sur le budget 2017 et la révision du cadre financier pluriannuel. La lettre rectificative n° 1 sur le budget 2017 le démontre: la révision aura nécessairement des conséquences sur le budget 2017. Ces deux dossiers doivent donc être négociés en même temps.
Madame la Présidente, il ne me reste que ma conclusion, si vous le permettez.
À cette fin, le Parlement s’est doté d’une équipe de négociation unique sur ces deux sujets. Nous avons notre mandat, adopté en juillet, que nous complétons aujourd’hui. C’est maintenant au Conseil d’accélérer. Il n’y a pas de temps à perdre pour nos concitoyens et pour l’Europe.