Pervenche Berès, rapporteure. − Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, je vous prie de m’excuser de cette confusion d’horaire et vous remercie pour ces informations découlant du processus de consultation de la Commission européenne qui, d’une certaine manière, anticipe la question que la commission de l’emploi et des affaires sociales du Parlement européen souhaitait ici soulever. Il n’en demeure pas moins que, pour la commission de l’emploi et des affaires sociales, les conséquences du non-renouvellement de la stratégie « emploi » sur la santé et la sécurité au travail sont une source d’inquiétude.
D’abord, parce que cette Commission européenne a adopté, au début de son mandat, avec le soutien du Parlement et du Conseil, une stratégie dite « Europe 2020 », dont, manifestement, la question du modèle social, la question de la santé et de la sécurité au travail devaient faire partie.
Nous nous souvenons aussi que le président de la Commission, l’année dernière, en septembre, dans son discours sur l’état de l’Union, a indiqué que la question du modèle social était un élément de la compétitivité de l’Union européenne. Or, pour nous, la question de la santé et de la sécurité au travail est au cœur de ce modèle social. Nous avons parfois eu l’impression que, aux motifs que la crise était là, alors même qu’elle rendait plus impérieux le besoin de cette stratégie, on la laissait de côté.
De la même manière – nous ne l’avons pas évoqué dans la question orale, mais tout de même –, nous savons que la question d’une initiative législative dans le domaine des maladies musculo-squelettiques a été écartée du calendrier prioritaire de cette Commission. Au fond, la question que nous vous avons posée, Monsieur le Commissaire, est de savoir pourquoi il en est ainsi, alors que cette stratégie pour la santé et la sécurité au travail est un élément reconnu par tous les acteurs comme étant non seulement au cœur du modèle social mais comme étant aussi un élément de progrès, d’incitation des États membres à aller dans la bonne direction. Quels ont été les obstacles qui ont empêché son renouvellement?
La commission de l’emploi et des affaires sociales a agi, à travers cette question orale et la proposition de résolution que nous soumettrons à la plénière, avec un certain sens de la mesure et de la responsabilité. Nous n’avons pas cherché à susciter une polémique. Nous voulons savoir quels ont été, dans le contexte où nous sommes aujourd’hui, les obstacles qui se sont dressés pour que vous puissiez, au nom du collège, renouveler cette stratégie qui est absolument indispensable.
J’ajoute que, depuis l’adoption par le Parlement européen, le 5 décembre 2011, d’une évaluation des résultats de cette stratégie, nous nous sommes penchés sur l’impact de la crise sur les plus vulnérables. Là encore, nous voyons que cette stratégie, il serait non seulement nécessaire de la renouveler, mais qu’elle répondrait profondément aux besoins que cette crise a ravivés.
Enfin, je dirai qu’outre cette initiative, nous nous inquiétons de ce que la crise serve de prétexte ou d’argument pour laisser de côté ces éléments fondamentaux du modèle social auquel nous sommes tant attachés. D’autant que la stratégie dont nous nous étions dotés, à l’époque, est une stratégie qui a besoin d’être renouvelée, parce que les technologies ont évolué, qu’elles ont fait surgir de nouvelles difficultés dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. Lorsque le Parlement européen a examiné cette question, l’enjeu du stress au travail – qui n’était pas au cœur de la précédente stratégie – est très clairement apparu comme un élément fondamental.
De la même manière, la question de l’impact de cette crise – que l’Union européenne, malheureusement, connaît maintenant depuis trop longtemps – apparaît comme un élément déterminant pour renouveler la stratégie.
En clair, je comprends que la consultation que vous avez menée – nous nous en réjouissons – vous incite à aller de l’avant mais permettez-nous tout de même de dire, au nom de la commission de l’emploi et des affaires sociales que nous craignons que cette stratégie arrive maintenant trop tard. Que, fondamentalement, en dépit de l’espoir que nous avions placé dans le modèle social européen, avec la précédente stratégie, il y a eu une petite perte en ligne et – je peux vous le dire, au nom de l’ensemble des collègues de la commission de l’emploi et des affaires sociales – nous le regrettons.
Nous vous accompagnerons dans les impulsions que vous pourrez apporter pour qu’un message soit délivré à la fin de votre mandat mais nous aurions préféré qu’il arrive avant. Pourquoi? Quels ont été les obstacles qui ont empêché que cela se passe autrement?