Madame la Présidente, Monsieur le Président de la Commission, Monsieur le Président en exercice du Conseil,

l’articulation entre les deux débats que nous venons d’avoir est intellectuellement cohérente. Est-elle vraiment traduite dans la pratique? Nous avons des doutes au sein du groupe socialiste et démocrate, parce que, entre le texte tel qu’il nous a été proposé par la Commission et un partenariat stratégique que vous voulez adopter au mois de juillet, sans que le Parlement ait pu se prononcer sur les lignes directrices « emploi » de manière explicite, on ne voit pas de cohérence.

Comment imaginer que nous nous engagions pour les dix ans qui viennent? Tout d’abord, sans faire le bilan de ce qu’a été la stratégie de Lisbonne, vous nous dites: « Tout a changé: nous n’avons plus vingt-sept lignes directrices, nous en avons dix! ». Mais est-ce cela le changement, Monsieur le Président de la Commission?

La cohérence, c’est de penser que, si l’on veut réussir la stratégie 2020, il faut partir de là où l’on est avant de regarder là où l’on va. Et il faut regarder là où l’on veut aller. Or, là où nous sommes aujourd’hui, c’est dans la crise la plus importante que l’ensemble de l’Union européenne ait connue depuis sa création; il n’y en a pas eu de plus grave. Nous ne pouvons pas l’ignorer. Nous ne pouvons pas entrer dans une stratégie de sortie de crise, qui serait la demande de la sortie de la puissance publique de ses responsabilités en matière économique, pour laisser le terrain libre au marché.

Nous ne pouvons pas réfléchir à cette stratégie sans utiliser les outils que nous avons. Vous le savez bien, Monsieur le Président de la Commission: nous ne sommes pas si riches que cela! Nous avons un outil, qui s’appelle le pacte de stabilité; nous en avons d’autres, qui s’appellent les perspectives financières. Si l’on n’articule pas tout cela clairement, nous n’arriverons nulle part.

Et puis, lorsque nous regardons le point de départ, nous avons des sujets d’inquiétude. Tout d’abord, nous, les socialistes démocrates, demandons d’urgence que les États ne soient plus soumis à la spéculation des marchés. Et il n’est pas question de la Grèce, de tel ou de tel autre État membre! Il est question du jeu de dominos et du champ libre à la spéculation.

C’est pour cela que nous proposons la mise en place d’un mécanisme de stabilité financière qui permette de mettre les États membres à l’abri de cette spéculation, pour qu’ils fassent ce qu’ils ont à faire, c’est-à-dire retrouver la voie de la reprise qui permet d’assurer le modèle social. Car tout le monde le sait, tout le monde l’a dit dans cette crise: notre modèle social, c’est notre meilleur viatique dans la globalisation!

Et si votre stratégie 2020 se traduit par une consolidation budgétaire qui tue ce modèle social, l’Europe sera demain défaite dans la compétition mondiale; et sa capacité à porter haut et fort ce modèle que nous incarnons sera dès lors perdue et nous aurons laissé la place libre aux autres continents, à moins que ce ne soit uniquement au jeu des marchés. Ce n’est pas notre vision de l’avenir.