Christine Revault D’Allonnes Bonnefoy, au nom du groupe S&D. – Monsieur le Président, alors même que nous venons d’inaugurer le nouveau bâtiment Václav Havel ici, pourquoi en revenir à la remise en cause de notre présence à Strasbourg?

Cette discussion, comme toutes celles qui l’ont précédée, n’est pas opportune. L’article 341 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose que le siège des institutions de l’Union est fixé d’un commun accord entre les États membres et, quand bien même il nous reviendrait d’en décider, le débat serait toujours peu à propos.

Cependant, puisqu’il est ouvert, je me permets de répondre aux arguments pratiques avancés par les partisans d’un siège unique bruxellois.

Seule la pratique du travail parlementaire a normalisé la fréquence de notre présence à Bruxelles. Les traités, eux, inscrivent le siège officiel du Parlement à Strasbourg. Les réviser pour ôter à Strasbourg ce statut, c’est ouvrir la voie à de multiples remises en question et marchandages sur l’ensemble des institutions et agences européennes.

Par ailleurs, les bâtiments à Bruxelles pourraient nécessiter une rénovation estimée à 300 millions d’euros, voire une reconstruction, qui pèserait encore plus sur le contribuable.

Quant à la proposition d’attribuer le siège de l’Agence européenne des médicaments à Strasbourg, permettez-moi de signaler que Strasbourg a déjà été écartée par le gouvernement français au profit de la ville de Lille.

Mais, plus encore, l’absence d’opportunité du débat n’est pas seulement d’ordre pratique, elle tient, avant tout, à l’importance de notre présence dans ces lieux. Être à Strasbourg n’est pas une fantaisie. Cet emplacement a une histoire, un sens et un avenir. Incontestablement, Strasbourg est l’incarnation même d’une part de l’histoire de la construction européenne, voire de son essence. La ville est précisément le symbole de la fraternité des peuples que l’Union recherche et cimente chaque jour un peu plus. Elle est une manifestation des bénéfices de la paix, de la réconciliation franco-allemande. C’est à Strasbourg que Simone Veil présida le premier Parlement européen élu au suffrage universel. C’est à Strasbourg qu’Helmut Kohl a reçu, samedi dernier, les hommages qui lui étaient dus.

J’entends le procès fait par certains collègues, mais tourner le dos à cet héritage serait une grave erreur, d’autant plus que le siège unique qui mettrait fin à la transhumance pourrait aussi bien être à Strasbourg.