Jean-Marc Germain, coordinateur S&D en commission des budgets, rapporteur sur la mise en œuvre du règlement conditionnalité État de droit
L’extrême droite a un mode d’emploi identique partout en Europe : affaiblir les juges, intimider la presse, étouffer la société civile… et toujours s’enrichir avec les fonds européens. Le Parlement européen, en adoptant aujourd’hui le rapport de Jean-Marc Germain, l’affirme clairement : l’Union européenne ne doit plus être une tirelire pour ceux qui sabotent la démocratie.
Pour rappel, le règlement de conditionnalité « État de droit » a été créé en 2021 pour protéger le budget de l’UE contre les violations de l’État de droit dans un État membre. Le rapport adopté aujourd’hui a pour but de faire le point sur sa mise en œuvre, alors que le dispositif devra être amélioré à l’occasion du prochain cadre financier. Notre message est simple : le mécanisme fonctionne, mais son application doit être renforcée. Il faut aller plus vite, frapper plus fort, et agir sans faiblesse.
Trop souvent jusqu’à présent, la Commission européenne a tardé et a traité ce règlement comme un “dernier recours”. Cette prudence est une erreur politique et une faute budgétaire. Quand l’État de droit recule, ce sont nos finances communes qui sont pillées : corruption, détournements de fonds, conflits d’intérêts… Pour nous c’est simple, basique : l’argent public européen doit être protégé, tout le temps, et les règles doivent être appliquées sur des bases techniques et juridiques — jamais dans le marchandage, le chantage ou les “arrangements” de couloir.
Aussi, le Parlement européen exige la fin de l’opacité : accès systématique, rapide et sécurisé à l’information, contrôle démocratique renforcé, échanges structurés réguliers avec la Commission. Le brouillard profite toujours aux mêmes : ceux qui truquent et ceux qui couvrent.
Le rapport rappelle enfin trois exigences de bon sens :
– la proportionnalité ne doit pas servir d’alibi : dans les cas systémiques, comme en Hongrie, des suspensions plus élevées peuvent être justifiées, avec un suivi strict pour éviter tout retour en arrière ;
– les fonds gelés ne doivent pas être discrètement reprogrammés tant qu’il n’y a pas de mesures correctrices réelles, durables et vérifiables ;
– les citoyens ne doivent pas payer pour les dérives de leur gouvernement : les garde-fous pour protéger les bénéficiaires finaux doivent devenir concrets, pas théoriques.
Le rapport demande aussi des moyens renforcés pour ceux qui défendent l’intérêt général : meilleure protection des lanceurs d’alerte, financements adéquats pour le Parquet européen afin d’enquêter efficacement, soutien plus solide aux organisations de la société civile — premières cibles des gouvernements illibéraux.
Enfin, à l’approche des négociations du prochain budget européen 2028-2034, le Parlement met en garde contre un empilement confus d’outils et de conditions qui fragiliserait l’ensemble : l’Union doit se doter d’un cadre cohérent, lisible et robuste, avec la conditionnalité État de droit comme colonne vertébrale, pour que l’argent de l’Union serve les Européens, pas à financer ceux qui veulent les priver de leurs droits.