Pervenche Berès, rapporteure. – Madame la Présidente, Monsieur le Vice-président, cher Othmar Karas, c’est effectivement la deuxième fois que nous coopérons et je crois qu’en effet, nous avons aussi bien coopéré que la première fois.

La Commission avait mis sur la table une bonne proposition, cohérente. Si les États membres veulent une union des marchés des capitaux, alors il faut renforcer les autorités de supervision. Il n’est peut-être pas indispensable d’attendre la prochaine crise pour se rendre compte que, quand on développe un marché, il vaut mieux avoir un gendarme pour surveiller ce marché, quelle que soit la qualité des intervenants.

Cher Othmar Karas, lorsque vous avez pris la responsabilité de ce rapport à mes côtés, l’enfant n’allait effectivement pas très bien. Certains le considéraient même comme mort, parmi les États membres, certains s’en réjouissaient, mais nous l’avons sauvé. Nous avons fait en sorte que les États membres ne puissent pas se servir du prétexte – qui leur était politiquement utile – des progrès en matière de lutte contre le blanchiment d’argent pour s’en contenter, mais qu’ils assument bien qu’on ne pouvait pas faire de vrais progrès en matière de lutte contre le blanchiment d’argent sans aller de l’avant sur l’essentiel, c’est-à-dire que les autorités de supervision européennes soient réellement en mesure d’exercer leurs compétences.

Chose peut-être moins difficile, mais c’est selon moi une étape que nous devons saluer, nous avons aussi enregistré des progrès sur l’intégration d’un mandat lié à la durabilité. Les autorités de supervision, qu’elles relèvent du domaine bancaire, de l’assurance ou des valeurs mobilières, devront examiner la durabilité des modèles mis en œuvre par les institutions.

De la même manière, en matière de protection des consommateurs, nous avons franchi une étape importante pour l’étendre dans le domaine de la banque et de l’assurance sur la base des pouvoirs qui existent pour l’autorité de supervision des valeurs mobilières. J’estime que c’est une bonne avancée. Enfin, à l’initiative de certains de nos collègues, nous avons introduit une coordination des enquêtes mystères, ce qui est un bon moyen de protéger les consommateurs.

Par ailleurs, pour chacune des autorités, nous avons amélioré un dispositif, en l’occurrence autour de l’Autorité bancaire, pour lutter contre le blanchiment d’argent: c’était normal et juste, en attendant d’avoir une autorité réellement indépendante et une meilleure coordination.

Dans le domaine de l’assurance, nous avons tenu compte de la réalité. Trop souvent, dans ce secteur, des entreprises coquilles sont utilisées pour ne pas respecter les droits des consommateurs dans d’autres États membres: l’AEAPP aura des pouvoirs renforcés dans ce domaine et je ne peux que m’en réjouir.

Enfin, l’autorité des valeurs mobilières, l’ESMA, aura davantage de pouvoir d’intervention en ce qui concerne les fournisseurs de déclaration de données et les transactions sur les marchés financiers ou en matière d’indices de référence.

Toutefois, le cœur de la bataille, c’était évidemment la question de la gouvernance. Sur ce point, nous avons apporté des améliorations utiles à la prise de décision pour qu’elle soit mieux éclairée, notamment en cas de risque de conflit d’intérêts. Les présidents des autorités européennes de supervision pourront trancher en cas de difficulté à dégager des majorités et auront droit à une procédure d’approbation tacite pour la convergence de la supervision, le lancement de procédures en cas de violation du droit de l’Union et le règlement des différends entre les autorités nationales compétentes dans des situations transfrontalières.

De la même manière, les autorités seront obligées de mettre en place des groupes de coordination lorsque cinq autorités nationales compétentes le leur demanderont. Mais soyons honnêtes, et je pense, Monsieur le Vice-président, que vous serez obligé de partager mon diagnostic: il y a une certaine hypocrisie de la part du Conseil. Celui-ci souhaite toujours mettre en place cette union des marchés des capitaux, dont on sait qu’elle peut être utile au financement de l’économie réelle, mais lorsque nous voulons renforcer cette gouvernance, on nous dit qu’il faut conserver des autorités de supervision qui soient des «Member States driven institutions». Il y a là une limite qu’il faudra un jour dépasser: engrangeons ce que nous avons aujourd’hui, mais sachons que ce n’est qu’une étape.